25e dimanche du temps ordinaire C

Faites-vous des amis avec l’argent trompeur

19 septembre 2010

Frères et soeurs dans le Christ,

Puisse l’Esprit Saint descendre sur chacun de nous et nous donner de comprendre, par sa Sagesse, la profondeur, la largeur, la hauteur, de la parole divine que nous avons entendue dans les textes qui viennent d’être proclamés. Oui, puisse l’Esprit Saint ouvrir non seulement nos oreilles mais encore notre cœur afin que nous laissions germer et se déployer en nous la bonne nouvelle du salut annoncée par les lectures de ce jour.

Écoutons l’enseignement que saint Paul adresse à Timothée : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité. » Si nous-mêmes, nous voulons comprendre les Écritures, les textes bibliques que nous entendons tout au long de l’année, notamment lorsque nous nous rendons à la messe, il nous faut nous souvenir de ce désir de Dieu qui guide la parole des prophètes, des apôtres, des évangélistes et de tous les auteurs sacrés : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité. » Pour sauver l’homme, Dieu ne recule devant rien. Il conseille, il avertit, il exhorte, il menace, il sanctionne, il utilise tous les registres des rapports humains pour amener l’homme à la conversion, pour l’éloigner de la perdition et le conduire sur le chemin de la vérité et de la vie. « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité. »

Si nous acceptons cette vérité, les textes les plus durs de l’ancien Testament s’éclaireront comme de l’intérieur. Une lumière nouvelle en jaillira. Il en va ainsi du texte du prophète Amos que nous venons d’entendre. Le Seigneur Dieu, scandalisé par le comportement hypocrite des riches qui ne voient dans la religion qu’un frein à leur commerce ignoble et injuste, s’exprime en des termes terribles par la bouche d’Amos : « Non, jamais je n’oublierai aucun de leurs méfaits. »
Cette parole avertit ceux qui exploitent le pauvre et le malheureux que leurs comportements ne resteront pas impunis, qu’il leur faudra payer la note. Ce vigoureux avertissement n’est pas donné pour leur condamnation mais pour que les injustes comprennent qu’ils doivent changer radicalement de vie, se convertir maintenant, car tôt ou tard ils auront affaire à Dieu, à l’ami des pauvres et des petits, à sa justice que rien, sinon un cœur aimant, ne saurait fléchir.
Le Seigneur veut mettre fin à la folie des hommes, à la folie que l’argent sème dans le cœur des hommes. Oui, l’argent rend fou ! Il détourne l’homme de lui-même, de sa finalité divine, et en fait un animal sans foi ni loi. Telle était la situation du temps d’Amos, huit siècles avant Jésus-Christ, telle est aussi la situation du monde qui est le nôtre où une toute petite minorité de gens richissimes spéculent et s’enrichissent sur le dos des plus faibles.

L’argent rend fou, car il faut être fou pour croire que le Seigneur notre Dieu laissera un tel crime impuni. L’argent rend fou, car il faut être fou pour penser que l’on peut construire sa vie et vivre heureux en condamnant ses frères et ses soeurs à la misère. L’argent rend fou, car il ne se suffit jamais à lui-même. Il n’y en a jamais assez, il en faut toujours davantage, et il finalement il n’y a de place que pour lui, pour lui seulement et pour rien d’autre.
L’avare n’est-il pas complètement lié par son argent. Il s’inquiète à son sujet, il a peur qu’il lui échappe. L’argent lui donne des insomnies : qu’en sera-t-il de la bourse demain ? Mon débiteur me rendra-t-il la somme qu’il me doit ? Faut-il spéculer sur le cours du blé ou sur celui du cuivre ? L’anxiété le gagne. L’argent ne lui laisse aucun repos.
Oui, Jésus, le Christ dit vrai : nous ne pouvons pas servir à la fois Dieu et l’Argent : ou bien nous détesterons le premier, et nous aimerons le second ; ou bien nous nous attacherons au premier, et nous mépriserons le second.

Nous ne pouvons avoir qu’un seul Maître : choisissons donc celui qui nous libère, le Christ, le rédempteur de l’homme, et non pas Mammon, cet argent trompeur qui conduit à un asservissement toujours plus sévère, toujours plus impitoyable. Ne laissons pas l’argent devenir notre Maître, mettons-le au service du bien : utilisons l’argent trompeur pour donner du pain à celui qui a faim, des habits à celui qui est nu, un toit à celui qui est sans abri. Nous aurons alors un trésor dans le ciel. Oui, nous sommes tous appelés à nous faire des amis avec l’argent trompeur, afin que le jour où il ne sera plus là, c’est-à-dire quand nous paraîtrons devant Dieu sans autre richesse que l’amour que nous aurons témoigné aux autres, ces amis nous accueillent dans les demeures éternelles.

Peut-être me direz-vous : « en ce qui me concerne je n’ai pas grand chose, j’ai juste de quoi vivre, il m’arrive même de ne pas arriver à la fin du mois ». C’est vrai, la vie est difficile et il peut arriver que nous-mêmes nous manquions de ce que nous jugeons nécessaire. Mais ce n’est pas parce que l’on a peu qu’il faut en plus se priver de la joie du partage. Il y a en effet une véritable joie à partager avec ceux que le Seigneur met sur notre chemin pour nous éduquer à la liberté et nous donner de vivre plus pleinement.
Et puis donner, même si l’on a peu, surtout si l’on a peu, c’est faire un acte de foi. C’est croire que le Seigneur est véritablement notre berger, comme nous l’enseigne le psaume vingt-deux, et que rien ne saurait nous manquer. C’est croire que Seigneur est véritablement notre Maître et qu’il pourvoit à ce qui nous est nécessaire, même si pour cela il nous oblige parfois à abandonner ce qui nous est nécessaire. Incroyable paradoxe qui parcourt toute l’Écriture. Souvenez-vous, par exemple, de la veuve de Sarepta, cette veuve particulièrement pauvre à qui le prophète Élie demanda de cuire ce qui lui restait de farine alors qu’elle-même n’avait plus rien à manger ni pour elle ni pour son fils. Dans la foi, elle répondit favorablement à la demande du prophète. Elle y gagna et sa vie et celle de son fils.

Tous, nous sommes appelés à donner, largement, généreusement, dans la foi en Dieu, par amour de notre Seigneur Jésus-Christ. Tous, nous sommes appelés à ouvrir nos mains, toujours plus grand, afin que, ainsi ouvertes par notre offrande, le Seigneur puisse les combler de ses biens. C’est en ouvrant nos mains que nous nous ouvrons à la grâce. C’est en ouvrant nos mains que nous accueillons la vie. C’est en ouvrant nos mains que nous nous enrichissons. Amen.

Textes du jour :
Am 8, 4-7
Ps 112
1 Tim 2, 1-8
Lc 16, 1-13
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